Publications : 

   

2024_09_C4

Entreprises et climat : un nouvel horizon vers la neutralité carbone ou un simple mirage ?

source : Réponse Carbone 4 à la consultation publique du SBTi sur le Scope 3

 

Lutter contre le réchauffement climatique est une responsabilité que les entreprises ne peuvent plus ignorer. Le SBTi (Science-Based Targets initiative), avec son Corporate Net-Zero Standard, vise à encadrer cette responsabilité, en demandant aux entreprises de fixer des objectifs ambitieux pour réduire leurs émissions de carbone. Cependant, ce cadre est en pleine révision, et c’est dans ce contexte que Carbone 4, cabinet de conseil spécialisé en transition énergétique, a partagé sa réponse détaillée. Cette réponse met en lumière la complexité de l’enjeu et propose des pistes d’amélioration essentielles pour un véritable changement.

 

Repenser la mesure de l’alignement climatique

Carbone 4 introduit un concept clé : les « outcome based targets » ou objectifs basés sur les résultats. L’idée est simple, mais puissante : évaluer la pertinence des activités d’une entreprise non seulement en termes de réduction de son empreinte carbone, mais aussi par rapport à son alignement avec des objectifs climatiques globaux. Cela va bien au-delà des simples mesures d’émissions. Imaginez une entreprise qui produit des vélos : ses efforts pour limiter ses émissions seront, bien sûr, importants, mais ce qui compte véritablement est l’impact positif de ses produits sur la réduction globale des émissions, en favorisant un transport propre. Inversement, pour un producteur d’électricité à base de charbon, l’effort requis devra être bien plus drastique.

 

Pour cela, Carbone 4 propose que les objectifs soient différenciés par secteur et région. Un fabricant de vélos en Europe, par exemple, ne peut être jugé avec les mêmes critères qu’un producteur d’acier en Asie. Cette approche plus nuancée permettrait d’établir des objectifs plus réalistes et, surtout, plus efficaces.

 

Activer tous les leviers de la transition

Une des forces de la proposition de Carbone 4 est sa volonté d’intégrer tous les leviers de la transition énergétique. Ce n’est pas uniquement la réduction des émissions qui compte, mais aussi la manière dont les entreprises réinventent leurs modèles économiques. Carbone 4 évoque ici la nécessité d’intégrer trois concepts : la substitution, l’efficacité et la suffisance. Prenons l’exemple de l’électricité : augmenter la part d’électricité bas carbone est important (substitution), mais réduire la consommation globale d’énergie (suffisance) l’est tout autant.

 

Les entreprises sont donc encouragées à redéfinir leur rôle dans un monde en transition. Celles qui persistent à fabriquer des produits de courte durée de vie, encouragent une surconsommation nuisible. Cette redéfinition est complexe, car elle touche au cœur des modèles économiques, ce qui expose les entreprises à des risques politiques et économiques majeurs, mais c’est un passage obligé pour que leur contribution à la neutralité carbone soit réellement significative.

 

Oser aller au-delà de la réduction directe des émissions

Carbone 4 plaide aussi pour une approche plus large dans l’analyse des chaînes de valeur. Il est primordial que les entreprises ne se contentent pas de fixer des objectifs uniquement sur leurs propres émissions (scopes 1 et 2), mais qu’elles s’attaquent également à celles générées par leurs fournisseurs et clients (scope 3). Ce dernier, souvent le plus négligé, représente pourtant une part significative de l’impact environnemental d’une entreprise. Ici, la traçabilité devient cruciale. Carbone 4 propose l’utilisation de certificats environnementaux pour mieux contrôler l’impact des activités tout au long de la chaîne de valeur, mais prévient qu’ils ne doivent pas devenir un prétexte pour éviter les actions concrètes.

 

Le message est clair : les certificats doivent refléter une réalité physique et être utilisés de manière cohérente dans le temps et l’espace. Sans cela, il est facile de se cacher derrière des actions symboliques qui, en réalité, ne changent rien.

 

La nécessité de revoir les modèles de compensation carbone

La compensation carbone est un sujet sensible. Carbone 4 met en garde contre une utilisation abusive des crédits carbone, qui peuvent parfois masquer une véritable dépendance aux émissions de carbone. Si les crédits carbone doivent être utilisés, c’est uniquement pour contribuer à des efforts collectifs de neutralité carbone, et non pour substituer à des actions concrètes. L’enjeu ici est de taille : éviter que les entreprises ne ralentissent leur transition en s’appuyant sur des compensations symboliques qui ne réduisent pas réellement leur impact.

 

En fin de compte, la réponse de Carbone 4 appelle à une réflexion profonde sur la manière dont les entreprises abordent la décarbonation. Ce ne sont plus seulement des chiffres qui sont en jeu, mais un engagement réel à repenser les modèles économiques, à transformer les chaînes de valeur, et à s’aligner avec un futur bas carbone. Il est temps d’agir, non seulement pour survivre dans un monde en mutation, mais pour y prospérer.