s Un prophète—
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Quand la transition énergétique devient une chance !
source : Le soucis d’aider à comprendre les enjeux, et à bâtir des solutions..
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Le débat autour de la méthanisation agricole polarise souvent les opinions. Récemment, des critiques ont émergé, portées par des affirmations alarmantes qui, bien qu’exprimant certaines préoccupations, s’appuient parfois sur des amalgames ou des exagérations. Curieusement, certaines voix qui semblent aujourd’hui se poser en défenseurs du monde agricole ne s’en souciaient guère lorsque les agriculteurs luttaient en silence dans les campagnes, abandonnés à leur précarité. Pourquoi ce soudain intérêt, qui semble coïncider avec l’émergence du projet de méthanisation à La Chapelle-Neuve ? Passons en revue ces arguments, avec nuance et réflexion, pour rétablir une vision équilibrée et rationnelle.
1. Augmentation du prix du fourrage, mettant à mal les élevages en période de sécheresse
Cet argument repose sur une généralisation. Bien que certaines cultures dédiées à la méthanisation puissent concurrencer le fourrage, cela reste marginal si l’on valorise prioritairement des déchets agricoles. En période de sécheresse, ces cultures peuvent même être redirigées vers l’alimentation animale. Une gestion raisonnée des intrants est donc essentielle.
2. Fragilisation des sols : imperméabilisation, augmentation du taux d’azote, perte de fertilité
Les digestats issus de la méthanisation sont riches en nutriments, mais leur usage doit être encadré pour éviter un excès d’azote. Les pratiques d’épandage et les réglementations existantes, comme la directive nitrates, limitent ces risques. Présenter la méthanisation comme un danger systématique pour les sols relève de l’exagération.
3. Difficultés pour les jeunes de s’installer en raison de l’augmentation du foncier agricole
La hausse des prix du foncier est un problème multifactoriel, souvent amplifié par la spéculation et l’urbanisation, bien avant l’arrivée de la méthanisation. Ce phénomène mérite une régulation globale et ne peut être imputé uniquement à ces installations.
4. Endettement accru
Si les investissements nécessaires à la méthanisation sont élevés, ils s’accompagnent souvent de revenus stables à moyen terme grâce à la vente de biogaz. Les coopératives et les subventions permettent également de répartir les risques, limitant ainsi l’endettement individuel.
5. Concurrence accrue entre agriculteurs et « course à la matière organique »
Cet argument exagère un phénomène localisé. La réglementation en France limite strictement l’utilisation de cultures dédiées, en privilégiant les déchets agricoles. Une bonne gouvernance des projets peut éviter ces dérives.
6. Risques financiers endossés par les agriculteurs seuls
Dans les projets modernes, les risques sont souvent partagés avec des partenaires (énergéticiens, collectivités), et des mécanismes de sécurisation, comme les assurances, existent. Présenter les agriculteurs comme seuls porteurs du risque est donc réducteur.
7. Forte dépendance aux subventions publiques
Les subventions sont des outils d’amorçage pour accélérer la transition énergétique, et cette dépendance diminue au fil du temps, à mesure que les projets gagnent en rentabilité. Ce mécanisme est commun à toutes les filières émergentes, comme l’agriculture biologique.
8. Impossibilité de transmettre les méthaniseurs aux enfants
Bien que le coût des installations puisse poser problème, des mécanismes d’accompagnement existent pour faciliter leur transmission, notamment par des aides fiscales ou des formations adaptées.
9. Reprise des méthaniseurs par des non-agriculteurs
La reprise par des acteurs externes est rare et survient principalement en cas d’abandon d’exploitation. Ce phénomène reste exceptionnel et ne reflète pas la majorité des projets.
10. Perte d’autonomie des agriculteurs dans un système agricole industriel
Paradoxalement, la méthanisation peut renforcer l’autonomie énergétique des agriculteurs. Cet argument, bien que souvent avancé, ignore les bénéfices réels lorsqu’elle est intégrée dans un modèle diversifié.
11. Vives tensions avec les populations rurales
Les tensions autour des méthaniseurs ne se limitent pas à une simple opposition « projet contre riverains ». Elles traduisent des résistances plus profondes, souvent liées à une difficulté à appréhender les enjeux globaux de la transition énergétique. Habitués à un confort énergétique hérité de l’abondance fossile, certains opposants, par crainte du changement ou par refus de s’extraire de leur zone de confort, adoptent des postures catégoriques, voire extrémistes. Ces réactions, bien que compréhensibles face à des bouleversements perçus comme imposés, peuvent entraver le débat et empêcher une réflexion collective.
Mais au-delà de ces oppositions visibles, il existe une majorité silencieuse, souvent désireuse de mieux comprendre mais qui, par crainte de se heurter à des discours fermés ou d’entrer dans des confrontations stériles, préfère rester en retrait. Ce silence n’est pas un rejet, mais une forme de repli face à des débats tendus où l’émotion l’emporte parfois sur la raison. Encourager cette majorité à participer activement passe par des efforts pédagogiques clairs et ouverts, sans stigmatisation ni caricature, pour reconstruire des ponts là où des murs ont été érigés. C’est l’ambition de tinerzh.com.
12. Artificialisation des terres agricoles
L’installation de sites de méthanisation doit respecter des distances réglementaires pour limiter les nuisances, ce qui peut éloigner les installations des exploitations agricoles d’origine. Cela peut nécessiter l’utilisation de nouvelles zones, voire l’artificialisation de terrains non exploités. Toutefois, il est rare que cela implique de détruire des forêts ou des espaces naturels majeurs. La réglementation incite à privilégier des terres déjà anthropisées (industrielles ou dégradées), réduisant l’impact sur les terres agricoles. Par ailleurs, rappelons que l’extraction de pétrole nécessite également une forte artificialisation, souvent avec des conséquences bien plus lourdes sur les écosystèmes.
Mais il est ironique de constater que ces opposants, qui revendiquent souvent une valorisation du local, semblent bien plus à l’aise lorsque ces infrastructures restent à mille lieues de leur propre environnement, pour extraire du pétrole.
13. Captation de la ressource en eau
Les cultures énergétiques, souvent moins exigeantes en irrigation que d’autres productions, n’accaparent pas significativement les ressources hydriques. Valoriser les déchets organiques limite encore davantage cet impact.
14. Détournement de terres au détriment de la souveraineté alimentaire
Les réglementations françaises garantissent que la production alimentaire reste prioritaire. Accuser la méthanisation de menacer la souveraineté alimentaire revient à ignorer ces cadres stricts.
Conclusion :
La méthanisation agricole, souvent critiquée à l’excès, offre un potentiel réel pour la transition énergétique et l’autonomie des agriculteurs. Bien encadrée et expliquée, elle peut devenir un pilier d’un modèle agricole durable, à condition de dépasser les peurs et de construire un dialogue ouvert avec toutes les parties prenantes.