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2024_09_Mammouth

Le renouveau de l’éducation face aux défis du futur

 

On pourrait commencer cet article par une énumération classique des préoccupations de la rentrée scolaire, cette fameuse période où tout semble reprendre un rythme bien rodé, presque prévisible. Pourtant, ce ne serait qu’effleurer la surface d’un problème bien plus profond. Car au-delà de cette symphonie récurrente des cartables et des agendas bien remplis, c’est une question plus vaste qui s’impose à nous, presque en sourdine : sommes-nous encore en phase avec le monde que nous enseignons ?

 

Il fut un temps où l’éducation se voulait une simple préparation au monde des adultes, un passage de relais, méthodique et répétitif, de savoirs transmis d’une génération à l’autre. Mais aujourd’hui, ce monde que nous promettons à nos enfants n’est plus une ligne droite tracée avec soin ; il est en constante mutation, façonné par des bouleversements climatiques, technologiques et sociétaux. Comment alors justifier de continuer à enseigner comme si demain ressemblait à hier ? Un monde stable, prévisible et répétitif, n’est-il pas une illusion rassurante que nous entretenons dans nos salles de classe ?

 

Prenons un instant pour réfléchir à ce que nous considérons comme essentiel dans le socle des apprentissages. Certes, savoir lire, écrire et compter restera toujours un bagage incontournable, tout comme la capacité à se mouvoir dans la complexité des relations humaines et des échanges. Mais, à côté de cela, devons-nous réellement continuer à enseigner une géographie qui ne correspond plus à celle que nos enfants exploreront dans quelques décennies ? Une économie basée sur la croissance infinie, alors que les ressources planétaires s’épuisent et que l’énergie renouvelable devient une clé pour notre survie collective ?

 

Et que dire des mathématiques, ce pilier souvent détesté mais absolument crucial pour comprendre le monde de manière abstraite, pour distinguer les concepts des réalités tangibles, pour s’élever au-dessus des émotions qui parasitent si souvent nos jugements. C’est un fait : sans une base solide en mathématiques, la capacité à appréhender des notions complexes, comme les ressources énergétiques ou le changement climatique, se réduit comme peau de chagrin. Il ne s’agit pas seulement de savoir manipuler des chiffres ou résoudre des équations, mais bien de penser autrement. Sans les maths, il devient difficile d’appréhender les idées abstraites qui sous-tendent notre réalité.

 

Et cela va plus loin : si l’éducation ne nous apprend plus à discerner, à filtrer les émotions et les impressions qui nous envahissent chaque jour pour en tirer un raisonnement rigoureux, quel est alors son rôle véritable ? Le monde de demain exige non seulement des connaissances pratiques, mais surtout une capacité à réfléchir, à juger, à critiquer avec discernement ce qui nous entoure. Faut-il alors enseigner plus de philosophie, cette discipline qui nous apprend à interroger nos passions, nos libertés, notre rapport à la matière et au langage ? Absolument, mais sans ce socle mathématique, cet effort semble vain.

 

La vérité, c’est que la réforme nécessaire de notre système éducatif ne se résume pas à un simple ajustement de programmes, une énième initiative ministérielle qui nous laisse croire que quelques ajustements suffiront. Ce dont nous avons réellement besoin, c’est d’un bouleversement profond de nos priorités pédagogiques, d’une remise en question radicale de ce que nous considérons comme des savoirs fondamentaux. Oui, il est grand temps de réfléchir à l’éducation dans un monde qui ne sera plus jamais comme avant, et d’accepter que les certitudes d’hier ne sont plus les réponses d’aujourd’hui.

 

Mais poser cette question revient aussi à s’interroger sur ceux qui doivent transmettre ces savoirs. Comment préparer un corps enseignant – déjà soumis à tant de pressions – à cette transformation profonde ? Comment réinventer l’éducation sans réinventer ceux qui, chaque jour, façonnent les esprits de demain ? Faut-il rappeler que le « mammouth » de l’Éducation Nationale n’a jamais été réputé pour sa souplesse ni sa propension à évoluer rapidement ? Pourtant, c’est bien dans cette direction que nous devons tendre.

 

En fin de compte, la question qui se pose n’est pas seulement celle de ce que nous devons enseigner, mais bien de comment et pourquoi nous le faisons. Sommes-nous prêts à former des esprits libres, capables de juger avec discernement, ou bien préfèrerons-nous rester dans l’illusion confortable d’un monde stable, où les vieilles recettes continuent de fonctionner ?