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2024_09_CRE

Les marchés de gros sous l’œil de la CRE en 2023

source : Rapport_de_surveillance_2023.pdf (cre.fr)

 

La crise énergétique qui a marqué l’Europe en 2022 et 2023 a profondément transformé le paysage énergétique français et européen. Ce rapport de surveillance, publié par la Commission de régulation de l’énergie (CRE), met en lumière les défis et les opportunités qui se sont présentés au cours de cette période de turbulence exceptionnelle.

 

L’année 2023 a vu une amélioration progressive des conditions de marché, marquée par une baisse significative des prix de gros du gaz et de l’électricité. Cette diminution s’explique par une réorganisation rapide des flux d’approvisionnement en gaz naturel, suite à l’arrêt quasi-total des livraisons russes et la montée en puissance du gaz naturel liquéfié (GNL). La France, grâce à ses infrastructures portuaires, est devenue un acteur clé dans l’importation de GNL, assurant ainsi une certaine stabilité dans la chaîne d’approvisionnement énergétique. Le marché français de l’électricité, quant à lui, a connu une résilience impressionnante malgré les difficultés liées à la disponibilité du parc nucléaire, causées par des corrosions sous contrainte.

 

La crise a néanmoins révélé l’ampleur des vulnérabilités systémiques dans les approvisionnements énergétiques. La CRE, dans son rôle de surveillance des marchés de gros, a su mobiliser ses outils de détection pour prévenir les manipulations de marché et garantir la transparence. Son action a été renforcée par la réforme du règlement européen REMIT, entrée en vigueur en 2024, qui vise à accroître les sanctions contre les abus de marché. Cette réforme marque un tournant dans la régulation des marchés de gros, en particulier avec l’élargissement de son champ d’application aux produits financiers et aux instruments de négoce.

 

Pour les acteurs économiques, la reprise a été douloureuse mais porteuse d’enseignements. Les mécanismes de marché, bien que sous tension, ont fonctionné comme un miroir révélant les distorsions entre l’offre et la demande. En parallèle, les efforts de sobriété énergétique des consommateurs ont permis de réduire la demande, montrant qu’une véritable transition vers des comportements plus économes est possible. Cela nous amène à questionner l’avenir : comment maintenir cet élan de sobriété dans un monde où les prix de l’énergie demeurent instables ?

 

Ce rapport nous offre une fenêtre sur l’avenir énergétique de la France. Avec la fin programmée du dispositif ARENH en 2025, les marchés à terme deviendront la principale référence pour les coûts d’approvisionnement en électricité. Cette évolution représente une opportunité pour stabiliser les prix à long terme, mais elle exige aussi une vigilance accrue des régulateurs pour éviter les dérives spéculatives.

 

À travers cette analyse, il apparaît que l’Europe a su résister aux chocs exogènes, en adaptant rapidement ses flux d’approvisionnement. Toutefois, cette résilience repose sur un fragile équilibre. Alors que la France retrouve son statut d’exportateur net d’électricité en 2023, il est clair que la crise a laissé des traces indélébiles. Ce n’est pas seulement une question de prix, mais aussi de confiance. La CRE joue ici un rôle crucial pour restaurer et maintenir cette confiance, non seulement parmi les producteurs et les consommateurs, mais aussi auprès des marchés financiers et des investisseurs qui façonnent l’avenir de l’énergie.

 

En écho à cette situation, on pourrait dire que la crise énergétique, bien qu’amère, nous a donné un aperçu de ce que pourrait être un monde où la consommation est rationalisée. Mais la question demeure : sommes-nous prêts à embrasser cette nouvelle réalité ou allons-nous retomber dans des schémas anciens, une fois la tempête passée ?