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Éducation et énergie : la nécessaire transformation d’un paradigme fossilisé
source : 7 – Les énergies renouvelables – Cours des Mines 2019 – Jancovici – (youtube.com)
Dans un monde en perpétuelle quête de solutions pour un avenir plus durable, les énergies renouvelables sont souvent présentées comme une évidence incontournable. Pourtant, derrière cette façade d’optimisme, se cache une réalité plus nuancée, que Jean-Marc Jancovici met en lumière dans son cours de 2019 aux Mines, un rendez-vous devenu emblématique pour les esprits curieux et les citoyens engagés. Cet article explore les subtilités et les défis des énergies renouvelables, en reprenant les idées principales de ce cours avec un regard critique et analytique.
Une définition glissante
Lorsqu’on parle d’énergies renouvelables, on imagine souvent des forêts verdoyantes, des éoliennes tournoyant gracieusement dans le vent ou encore des panneaux solaires scintillant sous le soleil. Pourtant, derrière cette vision idyllique, se cache une réalité complexe. Comme Jancovici le souligne, la définition même d’une énergie renouvelable est trompeuse : c’est une énergie dont le stock se renouvelle au moins aussi vite que la vitesse à laquelle elle est consommée. Cela semble simple, mais en pratique, toutes les énergies dites « renouvelables » ne se valent pas. En effet, certaines sources d’énergie peuvent sembler renouvelables, mais les dispositifs de captation, eux, sont loin de l’être. Un dilemme qu’il est essentiel de comprendre si nous souhaitons véritablement transformer notre modèle énergétique.
La biomasse, un faux ami ?
Prenons l’exemple de la biomasse, souvent citée comme une énergie renouvelable. Or, la réalité est bien plus nuancée. Si l’on coupe un arbre pour le brûler, est-ce réellement une énergie « renouvelable » si la forêt déboisée ne peut pas se régénérer aussi rapidement ? La France se targue d’une superficie forestière stable, mais la consommation mondiale de bois reste un défi. Dans des régions comme le nord de l’Europe, des zones autrefois denses en forêts sont aujourd’hui réduites à des vestiges boisés. Le paradoxe est flagrant : la déforestation résultant de la surexploitation des ressources boisées met en lumière la fine ligne entre renouvelabilité et épuisement des ressources.
Photovoltaïque et biogaz : des solutions viables ?
Le photovoltaïque, autre figure de proue des énergies renouvelables, est souvent présenté comme une solution prometteuse. L’énergie solaire est, après tout, l’une des sources d’énergie les plus abondantes de la planète. Pourtant, l’énergie solaire reste diffuse, et le rendement énergétique des panneaux solaires ne compense pas toujours leur empreinte écologique. En effet, la fabrication de panneaux nécessite des matériaux non renouvelables tels que l’aluminium, le silicium, ou le cuivre, dont l’extraction et le raffinage génèrent une quantité significative de CO2. Pire encore, lorsque cette énergie est stockée dans des batteries, l’empreinte carbone s’aggrave, faisant grimper les émissions jusqu’à 250 grammes de CO2 par kilowattheure.
Quant au biogaz, issu de la fermentation de matières organiques, il semble prometteur, mais sa production en grande quantité reste limitée. Bien qu’il soit utilisé pour générer de l’électricité ou pour alimenter des véhicules, il ne représente qu’une part minime du mix énergétique mondial, notamment comparé aux géants que sont le charbon et le pétrole.
L’illusion d’un monde 100 % renouvelable
L’un des points les plus marquants du cours de Jancovici est sa critique acerbe de l’idée d’un monde entièrement alimenté par des énergies renouvelables. Il rappelle que, il y a trois siècles, l’humanité vivait déjà dans un monde 100 % renouvelable. Mais ce monde, c’était celui de 700 millions d’habitants, dont la grande majorité était des agriculteurs, vivant avec une espérance de vie inférieure à 30 ans. Avec 8 milliards d’habitants aujourd’hui, un retour à ce modèle semble tout simplement irréalisable. Le rêve d’une transition énergétique totale se heurte à la dure réalité des besoins modernes : comment alimenter une économie mondiale en constante expansion avec des sources d’énergie plus diffuses, moins denses et souvent intermittentes ?
Un avenir à construire… avec prudence
À ce stade, il devient clair que les énergies renouvelables, aussi attrayantes soient-elles, ne peuvent pas constituer une solution unique à nos défis énergétiques. La promesse d’un monde alimenté uniquement par le soleil, le vent et les forêts ne saurait remplacer du jour au lendemain les combustibles fossiles qui ont permis à notre société de prospérer depuis la révolution industrielle.
Toutefois, cela ne signifie pas qu’il faille abandonner la recherche et l’investissement dans ces technologies. Comme l’explique Jancovici, il est impératif de diversifier notre portefeuille énergétique et de trouver des moyens de combiner les forces des énergies renouvelables avec d’autres sources, tout en tenant compte de leurs limites respectives. La solution, comme souvent, résidera probablement dans un savant mélange de plusieurs approches, et non dans une seule solution miracle.
Un avenir à inventer
Si la transition énergétique est inévitable, elle n’en demeure pas moins semée d’embûches. Le débat autour des énergies renouvelables ne doit pas se limiter à une simple opposition entre passé et avenir. Il doit s’agir d’une réflexion profonde sur la manière dont nous utilisons nos ressources, dont nous équilibrons nos besoins et dont nous concevons notre avenir collectif. Car oui, l’énergie est un jeu complexe, mais c’est aussi une chance unique de repenser notre rapport au monde et aux autres.